Chine : la grande séduction

Depuis l’arrivée du président Xi Jinping, la Chine multiplie les œillades. L’opération de charme doit permettre au pays d’asseoir son rôle de superpuissance.

 

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La nature du régime chinois est, à première vue, en totale contradiction avec les conditions du soft power classique. Régime politique autoritaire, bafouements réguliers des droits de l’homme, investissements militaires massifs, diplomatie du gros bras avec certains voisins – on se rappelle de la crise territoriale qui l’opposait au Japon. Mais depuis la fin de la guerre froide, en se fondant sur des aspects moins tangibles, et plus diffus, comme l’influence intellectuelle et la fixation de normes comportementales, juridiques ou éthiques, le soft power est devenu l’attribut de l’affirmation des Etats sur la scène internationale.

« La période située entre les guerres de l’opium (1840-1860) et la fondation de la République populaire de Chine (RPC) en 1949 marque un lent déclin du pouvoir d’attraction de la civilisation chinoise. Ce déclin s’est opéré au rythme de la déliquescence de l’Empire, d’abord comme modèle de civilisation puis en tant qu’Etat » nous apprend Stéphanie Balme, dans « L’impuissance paradoxale du « soft power » de la Chine post-Mao. »

Pendant longtemps la renaissance de la nation chinoise a été davantage martiale et économique que culturelle ou intellectuelle. Mais depuis son élection en 2012, Xi Jinping a adapté sa tactique en matière de politique extérieure. Désormais la Chine soigne son image pour obtenir la reconnaissance qu’elle estime mériter. On le voit par la multiplication des rencontres bilatérales, une coordination accrue dans la gestion des crises, des plans d’investissement massif ou l’organisation de grands évènements internationaux – J.O en tête.

La Chine ne se contente plus de miser sur l’économie, stratégie court-termiste, spécialement en période de crise : Pékin se lance dans une gigantesque opération de séduction. Cela passe par le promotion d’une culture plurimillénaire, le diffusion du chinois, et l’aide au développement (la Chine était le second investisseur asiatique en Afrique en 2013, derrière – surprise! – la Malaisie).

Le dernier Sommet de l’APEC (Coopération économique pour l’Asie-Pacifique), organisé à Pékin, a réunit les représentants d’un tiers de la population mondiale, 60% du PIB et près de la moitié du commerce international. Ce Sommet mammouth a également permis à la Chine de s’affirmer comme le centre du bassin croissance. A cette fin, elle avait établi un accord de libre-échange avec la Corée du Sud – autre acteur majeur de la région, et ancien ennemi – avant le début du forum. Souhaitant utiliser l’APEC pour se poser en rassembleur de toute la région, elle s’est présentée en nouveau moteur – volant ainsi la vedette au projet de TPP américain.

L’ouverture d’une voie de commerce nommée la «route de la soie maritime du XXIe siècle», renouant ainsi avec le fier passé où l’empire du Milieu était la première puissance commerciale du monde, affiche ainsi clairement les ambitions chinoises. La Chine investit d’ailleurs dans des Etats susceptibles de devenir une alternative aux routes commerciales habituelles dans l’Océan indien (stratégie du collier de perles) et en Asie centrale (route de la soie).

La Chine se rachète également une conduite pour apparaître comme une nation bienveillante, respectueuse du droit international. Les tentatives de relance du dialogue avec le japon, glacial jusqu’alors, sont un bon exemple. L’éloignement du traditionnel allié nord-coréen, un autre. La Chine ne s’est ainsi pas opposée à de nouvelles sanctions exigées par le Conseil de sécurité de l’ONU contre le régime de Pyongyang

On assiste bien a une guerre d’influence que la Chine vient de déclencher contre les Etats Unis et les autres BRICS. Cette offensive du soft power chinois doit lui permettre d’écarter ses rivaux et préserver ses intérêts stratégiques nationaux. Cette politique chinoise n’est que la patte blanche du loup. Elle s’inscrit la stratégie ambitieuse et relativement agressive que mène le pays depuis dix ans pour devenir la première puissance mondiale. Elle montre également qu’après avoir usé et abusé du « hard power » fondé principalement sur les capacités militaires et l’intimidation – et dont la portée se limite au territoire asiatique voisin – la Chine a désormais les moyens de mener une politique d’influence à l’échelle du globe.

 

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