Barack Obama et Raul Castro ont lancé mercredi 17 décembre la normalisation des relations diplomatiques entre les Etats-Unis et Cuba. Après des décennies de tensions héritées de le Guerre froide, les deux pays reprennent officiellement leur dialogue – rapprochement important mais symbolique tant il est vrai que de fait les rapports entre les deux pays se densifient déjà depuis des dizaines d’années.
Cuba et les Etats-Unis réconciliés. Une étape historique a été franchie mercredi avec l’annonce du rétablissement des relations diplomatiques entre les deux pays, rompues depuis le 3 janvier 1961 – soit plus d’un demi-siècle. Lors de discours quasi-simultanés, les présidents Barack Obama et Raul Castro ont annoncé une série de mesures concrètes visant à améliorer les échanges. Ils ont aussi espéré une levée de l’embargo commercial imposé à l’île par les Américains depuis qu’en 1962, John Fitzgerald Kennedy l’instaurait. L’objectif de cet embargo était de précipiter la chute du régime cubain mis en place après la révolution de 1959. Il est en principe toujours en vigueur aujourd’hui, même si dans les faits il n’existe plus pour les produits alimentaires et les médicaments.
Le rétablissement des relations avec Cuba état l’un des objectifs que s’était fixé Obama en arrivant au pouvoir en 2008. Mais seules de petites mesures avaient été prises jusqu’alors, comme l’assouplissement des visites familiales à destination de l’île. « L’élément déclencheur [du côté américain] a été la libération d’Alan Gross mercredi », observe Nicole Bacharan, politologue spécialiste des Etats-Unis. Cet Américain, accusé d’espionnage par le régime communiste, était détenu depuis cinq ans à La Havane. En échange, trois Cubains emprisonnés aux Etats-Unis ont été relâchés.
La clé du revirement de La Havane à l’égard de Washington se trouve à Caracas. Pour les Cubains, le diagnostic est clair : outre une crise de gouvernance sans issue visible, l’économie vénézuélienne, dépendante du pétrole, est à bout de souffle, rongée par la récession, l’hyperinflation, l’endettement, les pénuries, la gabegie et la corruption. Même avant la chute des cours du pétrole, Caracas voyait ses ressources fondre. Or, les Cubains sont encore traumatisés par l’implosion de l’Union soviétique et la fin des subsides de Moscou, qui a précipité l’effondrement de l’économie de l’île. Le régime des frères Castro sait qu’il ne survivrait pas à un second choc, provoqué par l’arrêt de la perfusion de pétrole vénézuélien.
A vrai dire, des responsables des deux gouvernement se rencontraient discrètement depuis juin 2013. « Ces négociations sont restées extrêmement secrètes », souligne Nicole Bacharan. De plus, chaque année, plus de 90 000 citoyens américains se déplacent à Cuba, malgré les restrictions contre l’île qui empêchent les Nord-Américains d’y dépenser de l’argent ou d’importer des produits cubains. Ouverts depuis 2001 à certains types d’aliments et de produits pharmaceutiques, les échanges entre Cuba et les Etats-Unis font de ce dernier le 9eme partenaire commercial de l’île. Les américains sont déjà les premiers fournisseurs de denrées alimentaires et de devises pour l’île. L’officialisation des relations ouvre néanmoins la voie à un développement des relations entre les deux pays, ouvrant notamment la voie aux crédits des banques américaines.
Pour autant, le débat promet d’être houleux au Congrès américain. Dans ce domaine, la décision n’appartient en effet pas à Obama mais au Congrès. L’opposition républicaine, majoritaire dans les deux chambres, fait déjà entendre une voix discordante.. « Je ne pense pas que le Congrès lèvera le blocus », estime Nicole Bacharan. « Mais ce n’est pas vraiment important. Ce qui compte, ce sont toutes les mesures qu’a pris et prendra le président américain dans les deux ans de mandat qu’il lui reste à accomplir. »
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