La Russie traverse l’une des plus graves crises économiques de son histoire post-soviétique. Après une première salve de mesures de soutien à son économie, les économistes analysent la politique du Kremlin. Quelles perspectives pour l’économie Russe ?
Pour l’économie Russe, les augures sont mauvais. Malgré les appels répétés à la sérénité du Président Vladimir Poutine et de son Premier ministre Medvedev, la Banque mondiale prévoit une récession de 2,9 % de l’économie russe en 2015, selon son dernier rapport sur la croissance rendu public mercredi 14 janvier. En décembre, le rouble a dégringolé pour atteindre un niveau inédit, ce qui a largement impacté les portefeuilles des consommateurs russes. Malgré les efforts herculéens de la Banque centrale, après une très légère hausse à la mi-décembre, le rouble s’est effondré, atteignant de nouveaux records de faiblesse face au dollar (80 roubles pour un dollar) et à l’euro (100 roubles pour un euro). Le gouvernement russe a annoncé mercredi que l’inflation pourrait atteindre 17 % sur un an au printemps.
« La trajectoire de l’économie dans les six mois à venir va se révéler bien pire que prévu », prévient Chris Weafer, de la société de conseil Macro Advisory. Il prévoit une chute de 5 % du PIB au premier semestre 2015. « Consommation et investissements vont pâtir de la hausse des taux d’intérêt, l’inflation va augmenter ». Nombre d’entreprises russes sont endettées en devises et risquent donc d’être étranglées par la chute du rouble. Le « roll over » de leur dette porterait sur 170 milliards de dollars en 2015. Parallèlement, la liste des entreprises étrangères interrompant leurs opérations en Russie pour cause de chute du rouble s’allonge quotidiennement. Constructeurs automobiles, fabricants de meubles et de produits électroniques s’estiment incapables de fixer des prix dans une monnaie qui risque d’être fortement dévaluée dans des délais très courts.
La profonde crise financière dans laquelle le pays est plongé a été provoquée par l’action combinée de la chute faramineuse des cours du pétrole – principal produit d’exportation russe avec le gaz,- et des sanctions imposées par l’Occident en réaction à l’intervention militaire de Vladimir Poutine en Ukraine. Le patron de la première banque publique russe Sberbank, Guerman Gref, a averti mercredi que le pays risquait une crise « majeure » de son secteur bancaire si les cours du pétrole se maintenaient aux niveaux où ils ont chuté ces derniers jours (43 – 45 dollars le baril). Mais si la chute du rouble est aussi spectaculaire, c’est aussi parce que « les marchés sont de plus en plus persuadés que M. Poutine ne se préoccupe plus des intérêts économiques de son pays et poursuit simplement des objectifs géopolitiques illusoires », d’après le quotidien britannique Financial Times.
Les actions entreprises par Moscou à ce stade n’ayant pas eu l’effet escompté, les analystes s’attendent à ce que la politique monétaire russe prenne « une orientation moins orthodoxe ». Le ministère russe des Finances a procédé durant le mois de décembre à la vente de devises étrangères pour soutenir le rouble. Le but est en effet d’échanger des devises étrangères contre le rouble pour provoquer une réévaluation de la devise russe, mais les résultats ne se sont pas fait sentir. La mise en place d’un contrôle des mouvements de capitaux est notamment évoquée – en fixant un seuil en-dessous duquel les Russes ne pourraient pas effectuer de retrait de change ou de liquidité, ou en plafonnant les sommes convertibles en devises étrangères. Une telle mesure risque néanmoins de saper la crédibilité de Moscou sur les marchés. D’autres économistes ont évoqué la possibilité que la Chine intervienne pour soutenir son allié russe. La Banque centrale chinoise pourrait injecter des milliards de dollars dans l’économie russe et ainsi surprendre les spéculations.
Laisser un commentaire