Comment la stratégie de l’Egypte dans le Sinaï s’est avérée payante

Comment la stratégie de l’Egypte dans le Sinaï s’est avérée payante

Lentement mais sûrement, l’Égypte est en train de chasser les groupes terroristes du Sinaï. Début mars, 43 djihadistes de plus étaient tués dans des affrontements.

En 2019, l’Égypte aura réussi le pari de sécuriser en moins de sept ans la zone trouble du triangle de le triangle Rafah – El Arish – Sheikh Zuweid dans le Sinaï. Un exploit inédit dans un Moyen-Orient tourmenté ce que, lucides, les autorités égyptiennes ne manquent pas de relever. « La Libye (…), la Syrie, l’Irak qui sort de sa crise… Toute cette zone est extrêmement difficile, expliquait l’ambassadeur égyptien en France Ehab Badaway sur le plateau de l’Opinion, « L’Égypte est l’un des rares pays stables (…) ».

La bataille ne s’annonçait pourtant pas aisée pour le Caire, après la résurgence d’une « véritable insurrection » de groupes djihadistes dans la foulée de la destitution du président islamiste Mohamed Morsi en 2013, comme le rappelle Le Figaro. Parmi ces groupes, on retrouve Ansar Bayt al-Maqdis, une organisation terroriste ayant prêté allégeance à l’État islamique en 2014 (il se fait appeler depuis « Wilayat Sinaï », ou la « Province du Sinaï »). En 2015, le groupe devenait tristement célèbre en perpétrant l’attentat le plus meurtrier de l’histoire égyptienne à l’époque : les 224 occupants russes et ukrainiens d’un Airbus A321 qui reliait la station balnéaire égyptienne de Charm el-Cheikh à la ville russe de Saint-Pétersbourg ont été tués après la destruction de leur avion par le groupe terroriste. Deux ans auront pourtant suffi à ce dernier pour dépasser son propre record : en novembre 2017, le massacre des fidèles d’une mosquée dans la ville d’El Arich a fait 305 morts, dont 27 enfants.

 

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Le défi était donc de taille, et si des progrès restent à faire afin de stabiliser la région, les résultats des actions menées par le gouvernement égyptien sont déjà visibles. « L’opération Sinaï 2018, qui a débuté en février 2018, a forcé Wilayat Sinaï à battre en retraite. Les forces égyptiennes ont accordé une attention particulière à couper le groupe de l’aide extérieure. L’armée égyptienne a ciblé les réseaux de tunnels entre la bande de Gaza et le Sinaï et la marine égyptienne a augmenté les patrouilles dans la mer Rouge et le canal de Suez », constate Amr Emam, journaliste basé au Caire ayant contribué au New York Times, au San Francisco Chronicle et au site d’information de l’ONU IRIN.

Dans leur offensive contre les djihadistes du Sinaï, les forces égyptiennes « ont renforcé le maillage du terrain, avec l’aide d’informateurs, adopté des techniques de combat asymétrique (opposant un État fort à un ennemi faible disposant de très peu de moyens) et développé l’usage de drones pour mener des attaques plus ciblées. Les marges d’action du groupe « Province du Sinaï » ont été dégradées. Les djihadistes n’opèrent plus que par cellules isolées et clandestines », résume pour sa part Le Monde.

La stratégie égyptienne s’est avérée d’autant plus efficace qu’elle s’est déployée avec l’accord de la communauté. Le cheikh Ibrahim Al-Argani de la tribu Tarabin, « les Hommes libres » de la tribu des Sawarka et autres membres de l’Union des tribus du Sinaï ont même manifesté leur volonté d’être associés aux combats. Des appels que les autorités accueillent avec la plus grande prudence mais qui révèlent les progrès réalisés par les autorités égyptiennes sur le terrain politique.

 

La stratégie de l’Égypte pour le Sinaï

Pour le gouvernement égyptien, en effet, la victoire ne peut être exclusivement militaire. La péninsule du Sinaï est une région peu connectée et à la démographie très faible, et le pouvoir devra s’attaquer à reconstruire la région et redynamiser l’économie afin de consolider la paix.

Le Caire a d’ores et déjà lancé la construction de quatre nouveaux tunnels afin de mettre un terme au casse-tête de la traversée du canal canal de Suez. Selon les informations du site Africanews, le gouvernement égyptien a déboursé un milliard de dollars afin de connecter Ismaïlia et Port-Saïd. Cela permettra de réduire le temps de traversée à 4 minutes, contre plusieurs heures actuellement.

Le gouvernement égyptien prévoit également la construction de dix nouvelles routes s’étalant sur 1 139 km, la construction de zones industrielles et résidentielles pour un montant de 15,6 milliards de dollars ou encore la construction d’un pont de 32 km de long reliant le pays à l’Arabie saoudite.

Un mix d’économie, de politique et de stratégie militaire qui pourrait bien, comme anticipé par le Caire en 2018, mettre un terme à l’influence néfaste du terrorisme dans la région. « L’Egypte compte 100 millions d’habitants, elle a un poids considérable. Quand elle travaille à la stabilité de la région, cela a des effets significatifs » concluait, toujours pour l’Opinion, l’ambassadeur Badawy.

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