Salon de l’agriculture au Qatar : une chance pour la France?

Salon de l’agriculture au Qatar : une chance pour la France?

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La 7ème édition de l’Exposition internationale de l’agriculture du Qatar (Agriteq) a débuté ce mardi à Doha, dans un contexte particulier : la recherche de l’autosuffisance alimentaire. Le Qatar dépend en effet de l’importation pour l’immense majorité de ses besoins alimentaires (90% de la nourriture qu’il consomme). Il est à ce titre particulièrement vulnérable aux fluctuations du marché.

Soumis à un embargo porté par les Émirats arabes unis, l’Arabie saoudite, l’Égypte et le Bahreïn depuis juin 2017, le pays compte beaucoup sur cette rencontre pour renforcer son secteur agricole (1% du PIB, seulement). Le salon, qui se clôture le 22 mars, à jusqu’à présent regroupé les représentants de 51 pays, présentant aux riches émirs les techniques agricoles et agroalimentaires les plus haut-de-gamme du moment.

Le Qatar se rêve en hub agroalimentaire

Le Qatar veut devenir un hub agroalimentaire régional sur le modèle de Dubaï ou de Singapour. Il doit cependant faire face à un certain nombre de handicaps qui pénalisent ses ambitions : un climat difficile, des ressources hydriques restreintes, un marché de taille réduite et un manque d’expertise locale. Il existe toutefois plusieurs facteurs de demande importants qui créent un appel d’air favorable – une croissance démographique, de l’évolution des habitudes de consommation de la population locale et du développement du secteur touristique (avec un boum à prévoir pour la Coupe du monde 2022).

Le Qatar multiplie les actions pour aller de l’avant. L’État a ainsi procédé à l’extension de ses infrastructures de transport (extension de l’aéroport Hamad International, nouveau terminal de traitement des aliments au port Hamad pour la bagatelle de 444 millions de dollars …) et investit dans des entreprises agroalimentaires de pays bénéficiant d’une solide expertise dans le domaine (en Australie, au Pakistan ou encore à Oman). Le fonds souverain Qatar Investment Authority a même créé une filiale dédiée à ce marché : Hassad Food.

Le Qatar multiplie en parallèle les efforts pour soutenir sa production locale, en signant des partenariats avec les entreprises étrangères à la pointe en matière d’agriculture et d’agroalimentaire. Si bien que la production agricole de l’émirat couvre aujourd’hui 50% de ses besoins en viande, poisson et produits laitiers — a doublé voire triplé selon les domaines depuis le début de l’embargo de ses voisins arabes. Un premier pas vers les ambitieux objectifs de Doha. Dans le cadre de son programme national de sécurité alimentaire, le Qatar vise à produire 70% de ses besoins alimentaires d’ici 2024.

La Turquie, alliée indéfectible ?

« Plusieurs acteurs du Moyen-Orient ont pris la place des pays de l’embargo : la Turquie, l’Iran et les pays d’Asie », indique Nabil Ennasri, chercheur en sciences politiques spécialiste du Qatar. Les entreprises étrangères sont en effet attirées par le pouvoir d’achat très important de la population locale. Déjà salvateurs durant la crise du Golfe, le pays a noué des liens particulièrement étroits avec la Turquie (un partenariat économique, qui couvre notamment les télécommunications et les services financiers, a été signé à la fin de l’été dernier).

Pour rappel, lorsque l’Arabie saoudite a fermé la seule frontière terrestre du Qatar, elle a de fait coupé une des principales voies d’approvisionnement de l’émirat. En réaction, la Turquie a envoyé en moins de 48 heures des avions cargo chargés de lait, de yaourt et de volaille pour secourir son allié. Les échanges entre les deux pays tournent depuis à plein régime (ils ont augmenté de 90% au cours des quatre mois suivant le début du blocus). Force de ce lien, le Premier ministre du Qatar, Cheikh Abdullah bin Nasser Al-Thani, et le ministre turc de l’agriculture, Bekir Pakdemirli, ont conjointement inauguré l’exposition Agriteq. S’y sont rendues pas moins de 40 entreprises turques.

La France veut sa part

Ankara n’est pas la seule à vouloir se positionner. C’est également le cas de Paris, qui veut profiter de l’intérêt renouvelé de Doha pour l’agriculture pour exporter ses produits et ses savoir-faire. La création d’une filière agricole et agroalimentaire au Qatar suppose un échange de pratiques et le développement de co-entreprises avec ses alliés. L’expertise agroalimentaire française assure aux produits hexagonaux une image très favorable au Qatar. Les exportations globales ont ainsi augmenté de 15% en 2017 à 84 M EUR (+50% pour les seuls produits alimentaires) d’après l’Ambassade de France à Doha. En tête on retrouve les exportations de volailles (+ 1081% en un an) et les conserves (+232%). La vente de machines françaises n’est pas en reste, avec des exportations d’équipements agricoles et forestiers en augmentation de 996%, d’après les douanes françaises.

L’avenir semble radieux pour les échanges entre les deux pays : le ministère français de l’Agriculture et de l’Alimentation et le ministère qatari des Municipalités et de l’Environnement ont signé en juillet 2017 une première déclaration d’intention visant à renforcer liens commerciaux, investissements et coopération. Ses effets commencent à se faire sentir comme le montrent les rencontres d’affaires France-Qatar en marge du salon Agriteq.

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