Conseil de sécurité de l’ONU : élection de cinq nouveaux membres

Conseil de sécurité de l’ONU : élection de cinq nouveaux membres

L’Assemblée générale de l’Onu a élu mercredi dernier les cinq nouveaux membres non-permanents du Conseil de sécurité pour la période 2021-2022 : l’Inde, le Mexique, le Kenya, la Norvège et l’Irlande. L’élection de ces deux derniers pour le groupe « Europe occidentale et autres États » s’est faite au détriment du grand perdant de cette nouvelle fournée, le Canada.

L’élection s’est tenue à New York dans des conditions de sécurité sanitaire exceptionnelles, réunissant à bonne distance et à tour de rôle les représentants de 193 nations. Rappelons rapidement que le Conseil de sécurité de l’Onu compte cinq membres permanents et dix membres non-permanents élus pour deux ans et renouvelés par moitié tous les ans. L’élection des nouveaux pays participant à la sécurité collective de la communauté internationale s’est tenue en même tant que celle du prochain président de l’Assemblé générale (le Turc Volkan Bozkir, diplomate et ex-ministre) et de celle des dix-huit pays participant au Conseil économique et social.

Le Mexique et l’Inde, porte-voix des réformateurs du Conseil de sécurité

Un seul candidat était cette année en lice pour le groupe Asie-Pacifique, l’Inde, élue avec la majorité des deux-tiers de l’Assemblée générale requise. Même scénario pour le Mexique, seul candidat pour la région Amérique latine et Caraïbes, qui a été élu pour la cinquième fois depuis la création des Nations-Unies. Sa dernière participation au Conseil de sécurité de l’Onu date de 2009-2010, et faisait suite à celle de 2002-2003 pendant laquelle le Mexique s’était opposé aux guerres menées par les États-Unis en Afghanistan et en Irak.

Le représentant mexicain, Juan Rámon de la Fuente, ancien recteur de l’Université nationale autonome de Mexico, s’est assuré de son large succès grâce à une diplomatie mexicaine qui tente de sortir d’une certaine torpeur. Le pays demeure essentiellement tourné vers les États-Unis, et nécessairement vers ses problèmes internes (insécurité et corruption galopantes, État mis en échec depuis sa guerre perdue contre le narcotrafic, économie précaire et pauvreté systémique). Ainsi le président mexicain Andrés Manuel López Obrador n’est-il jamais sorti du Mexique depuis sa prise de fonction en 2018, pas même pour aller à Washington, et ce malgré une bonne entente assumée avec le président américain Donald Trump.

Toutefois, la diplomatie mexicaine quelque peu revigorée profitera de sa voix sur la scène internationale pour faire avancer l’idée déjà ancienne d’une réforme du Conseil de sécurité de l’Onu. En accord avec nombre de « pays en voie de développement », le Mexique se fera l’avocat d’une augmentation du nombre de sièges permanents au Conseil, ainsi que de la restriction de l’usage du veto par ces pays lors du vote de résolutions.

Âpre bataille entre Djibouti et le Kenya

De son côté, le groupe Afrique n’a pu s’entendre cette année sur un candidat unique pour le siège revenant au continent. Une bataille diplomatique a vu s’opposer le Kenya à Djibouti, et il a fallu deux scrutins pour que Nairobi l’emporte, à une voix près, et puisse prendre le relai de l’Afrique du Sud. Il s’agira de la troisième participation du Kenya au Conseil de sécurité, après les périodes 1973-1974 et 1997-1998.

Lors de sa campagne d’influence, le Kenya s’est targué du soutien officiel que lui a accordé l’Union africaine. De même il a mis en avant son implication dans les opérations de l’Onu dans la Corne de l’Afrique, au nord et à l’est de ses frontières. Le Kenya entretient aussi des relations étroites avec trois membres permanents du Conseil, la France, les États-Unis et la Chine, devenue en quelques années un partenaire économique majeur (cf les « nouvelles routes de la soie »). Djibouti s’est insurgé contre l’appui de l’Union africaine au Kenya et a plaidé en vain pour le principe de rotation des membres non-permanents. De l’avis de certains experts, l’âpre bataille risque de laisser des traces dans la diplomatie africaine.

Le Canada « humilié »

Le groupe Europe de l’Ouest et autres États a davantage l’habitude des scrutins serrés entre plusieurs candidats. Cette année la Norvège, l’Irlande et le Canada s’affrontaient pour deux sièges. Les deux pays européens ont respectivement totalisé 130 et 128 suffrages sur les 128 nécessaires, tandis que le pays d’Amérique du nord n’en recueillait que 108, recevant ainsi une gifle glaciale.

La dernière tentative du Canada pour intégrer le Conseil de sécurité en tant que membre non-permanent datait de 2010 et s’était soldée par un échec cinglant face au Portugal. Selon la presse canadienne, ce nouvel échec pourrait avoir des conséquences politiques pour le Premier ministre Justin Trudeau. Le magazine québecois l’Actualité, qui détaille « les dix raisons de la défaite du Canada », écrit en exergue de son analyse : « Se faire dire « non » par la communauté internationale en 2010, lorsque le gouvernement Harper avait tenté sa chance, était gênant. Cette fois, c’est humiliant. Deux rebuffades consécutives, c’est historique. Et ce n’est pas un hasard, c’est un message.» Et de mentionner notamment la perte d’influence comme de volontarisme du Canada sur la scène internationale. Contrairement au grand perdant, les « petits gagnants » ne bénéficient que de peu de visibilité sur l’échiquier mondial, mais ils ont su être plus efficaces et appréciés.

Gaëtan Mortier

 

 

 

 

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