Le Qatar a été accueilli mardi au Conseil de coopération du Golfe où l’Arabie Saoudite a pu mettre en scène un spectaculaire rapprochement. Les six pays pétroliers (Qatar, Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Bahreïn, Oman et Koweït) ont signé un accord de « solidarité et de stabilité » qui met fin au boycott subi par le Qatar depuis l’été 2017. A l’époque, le comportement ouvertement pro-Iran et pro-Frères musulmans de Doha avait fini par déclencher une grave crise qui aboutit à la rupture des relations diplomatiques et commerciales avec l’Arabie saoudite, ses alliés et même l’Égypte.
« Depuis deux ans l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis avaient réalisé que le Qatar avait remporté cette guerre qui lui avait été imposée, explique Georges Malbruno, journaliste spécialiste du Moyen Orient interviewé par RT France. Le Qatar a réussi à contourner le blocus en se rapprochant de la Turquie et de l’Iran, alors que c’était le but opposé recherché par Riyad et Abu Dhabi. » Si Mohammed ben Salman, le prince héritier d’Arabie saoudite, a déclaré que « nous avons aujourd’hui un besoin urgent d’unir nos efforts », il l’affirme dans un contexte encore tendu et sous l’impulsion de la médiation du Koweït et surtout des États-Unis. Cette réconciliation en chemin est considérée comme une victoire diplomatique pour l’administration Trump, tout en tombant à pic pour Joe Biden, juste avant son entrée en fonction. « MBS » le décharge ainsi d’une crise et espère sans doute adoucir le futur président démocrate qui a eu des propos menaçants envers Riyad en raison de ses violations des droits humains, à l’intérieur comme à l’extérieur de ses frontières.
Le grand gagnant de l’accord est selon les analystes le Qatar, qui n’aurait pour l’heure pas eu à faire de profondes concessions. Ainsi son rapprochement avec l’Iran et la Turquie n’est pas remis en cause, de même que la volonté saoudienne de fermer la télévision Al Jazeera – outil contesté d’influence qatarie – demeure lettre morte. « Peut-être que le Qatar mettra de l’eau dans son vin, mais je ne crois pas qu’il ira plus loin. Ce qui veut dire que cette crise ne se réglera pas complètement. Ce qui irritait l’Arabie saoudite va continuer une manière ou d’une autre » analyse Stéphane Lacroix, chercheur du CERI-Sciences Po sur RFI. Désormais, au-delà d’un accord général de principe et de la réouverture des frontières, experts et diplomates ont fort à faire pour aplanir de nombreux différends et adoucir les ressentiments de part et d’autre.
G.M.
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