L’Amérique latine à la recherche d’un nouveau souffle

L’Amérique latine à la recherche d’un nouveau souffle

Les représentants de 33 pays membres de la Commission économique pour l’Amérique latine (Cepal) se sont réunis la semaine dernière en Argentine afin d’esquisser des solutions aux défis urgents. Voies de sortie de crise, croissance et modes de développement, efforts d’intégration régionale, formes renouvelées de coopération, ont donné lieu à la signature à l’unanimité d’un document de projet de résolutions.

Faible croissance, pression inflationniste et problèmes structurels freinent et appauvrissent l’Amérique latine, des rives du Río Grande au Mexique à la Terre de Feu argentine et chilienne. « Une succession de crises a conduit au scénario d’une faible croissance et d’une accélération de l’inflation dans l’économie mondiale, ce qui, avec le ralentissement de la croissance du commerce, l’appréciation du dollar et le resserrement des conditions financières mondiales affectera négativement les pays de la région » analysait la Cepal avant le rassemblement.

« Cascade de crises » et « décennie perdue »

La région la plus inégalitaire au monde est affectée par une croissance à la durable faiblesse, aggravée par les effets de la crise économique liée à la pandémie de Covid 19, puis la guerre en Ukraine. Selon la Cepal, l’Amérique latine se dirigerait vers une autre « décennie perdue », comme ce fut le cas au cours des années 80. Les prévisions de croissance régionale pour 2023 ne sont que de 1.4 %, dans la petite foulée des décevants 1,8 % estimés pour 2022 (contre 2,7 % estimés en début d’année). 16 des 33 pays n’ont pas récupéré leur niveau de PIB d’avant la pandémie. 78 millions de personnes vivaient dans l’extrême pauvreté en 2021, soit 8 millions de plus qu’en 2019.

Interviewé par El País, José Manuel Salazar-Xirinachs, le secrétaire exécutif de la Cepal, l’Amérique latine traverse « une cascade de crises ». Une mauvaise dynamique de croissance remontant à 2014, à laquelle se superposent « les crises de l’éducation, de la santé, de l’emploi et du climat ». Les défis principaux concernent « la productivité et le développement productif, pour lesquels les gouvernements peuvent faire davantage. Deuxièmement la lutte contre les inégalités, qui ont augmenté avec la pandémie (…). Les pays avec moins d’inégalités ont une meilleure croissance. Troisièmement les politiques sociales, afin d’avancer vers un État protecteur. »

Transformation productive et intégration régionale

En conséquence la Cepal et ses États membres souhaitent impulser des politiques de développement qui seront l’objet d’évaluations. Les pays de la région « doivent progresser vers des économies à basses émissions carbone, dotées d’un haut contenu technologique permettant de faire face au changement climatique et de réduire les brèches, les hétérogénéités structurelles et les dualismes historiques qui les caractérisent », indique le document « Vers la transformation du modèle de développement en Amérique latine ».

La « transformation productive » doit notamment inclure la transition énergétique, l’agriculture et le tourisme durables, l’industrie de la santé, l’économie digitale, l’économie circulaire, sociale et solidaire, ou encore le soutien au micro et petites entreprises. Pour José Manuel Salazar-Xirinachs, « ce n’est plus le temps de changements graduels », mais de changements structurels décisifs. « Nous devons être capables de développer des dialogues multilatéraux et multi-acteurs nous permettant d’écouter les différentes visions qui cohabitent dans la région. (…) Comptez sur la Cepal pour continuer de réfléchir sur les stratégies régionales de sortie de crises, et afin de rechercher des consensus transformateurs pour la conception de politiques publiques et la prompte implémentation de l’Agenda 2030 sur le Développement Durable ».

L’intégration régionale stable et durable demeure en effet un défi pour l’Amérique latine. Les ministres des Affaires étrangères des 33 pays ont confirmé l’urgence de consolider les efforts et les espaces afin d’avancer vers une intégration qui permettrait à la région de parler d’une seule voix sur la scène internationale.

Gaëtan Mortier

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