Un G20 pas comme les autres

Un G20 pas comme les autres

Réunis en Indonésie, les pays membres du G20 se sont entretenus dans un contexte inédit de tensions internationales. Contre toute attente, ils sont parvenus à adopter un communiqué final stipulant que « la plupart » des membres « condamnent fermement la guerre en Ukraine ». En marge du sommet, d’importantes rencontres ont eu lieu entre les chefs d’État chinois, américain et français.

Ce sommet du G20, qui vient de se clore à Bali, aura été aussi politique qu’économique. La guerre en Ukraine a concentré toutes les attentions, de même que la recherche d’un improbable consensus. Et pourtant, c’est arrivé, puisque même la Russie a signé la déclaration finale. Et ce en l’absence de Vladimir Poutine, qui a envoyé à Bali son ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov. Outre la condamnation de la guerre par « la plupart » des pays, une phrase clé soulignant « différentes vues et évaluations sur la situation et les sanctions » a pu rallier la diplomatie russe. Celle-ci a d’ailleurs assumé que « l’usage ou la menace d’utiliser des armes nucléaires est inadmissible »… après avoir décomplexé sans ambages sa rhétorique nucléaire.

Accueillir l’Union africaine au sein du G20

Le texte souligne que la guerre « cause d’immenses souffrances humaines et exacerbe les fragilités existantes de l’économie mondiale – freinant la croissance, augmentant l’inflation, perturbant les chaînes d’approvisionnement, augmentant l’insécurité énergétique et alimentaire, et augmentant les risques pour la stabilité financière ». Les pays du G20 se sont notamment engagés à encadrer la hausse des taux d’intérêt et à reconduire l’accord sur les exportations de céréales afin d’assurer l’approvisionnement des pays du Sud.

A propos de la solidarité envers ces pays, et afin de mieux prendre en compte leurs intérêts, Emmanuel Macron a souligné que la France « soutient l’intégration pleine et entière de l’Union africaine au G20, au même titre que l’Union européenne ». Il s’agit selon lui d’un « élément clé » de la recomposition des « règles de gouvernance des institutions internationales ». Le président français a aussi annoncé une nouvelle initiative du G20 pour garantir l’approvisionnement et la production d’engrais du continent africain. Autre annonce faite, la tenue en juin prochain à Paris d’une « conférence internationale sur un pacte financier avec le Sud ».

Xi rencontre Biden puis Macron

Aussi importantes que la déclaration finale, des rencontres bilatérales rares ont marqué le début de la semaine. Lundi, à la veille du sommet, Joe Biden et Xi Jinping se sont rencontrés pour une longue discussion, une première depuis trois ans et l’élection du président américain. Fait notable, ils ont exprimé leur opposition à tout recours à l’arme nucléaire. La Chine ne condamne pas la guerre de Poutine, mais vient de tracer en filigrane sa ligne rouge.

Les deux puissances rivales se sont engagées à conserver des canaux de communication malgré leur compétition féroce. « Nous avons très peu de malentendus, a lourdement euphémisé Joe Biden. Nous devons juste déterminer quelles sont les lignes rouges ». Au-delà des dossiers brûlants bien connus, à commencer par la rivalité économique et Taïwan, le sujet Corée du Nord est revenu sur le devant de la scène. Celle-ci a en effet procédé ces dernières semaines à une série record de tirs de missiles, dont l’un a survolé le Japon en septembre. Elle s’apprêterait à réaliser un nouvel essai nucléaire. Biden a tenté de convaincre Xi de peser sur son allié nord-coréen, en avertissant que si Pyongyang « continue sur cette voie, cela entraînera simplement un renforcement de la présence militaire et sécuritaire américaine dans la région ».

Xi Jinping a également eu un entretien en marge du sommet avec Emmanuel Macron (d’une durée de 40 minutes, contre trois heures avec Joe Biden). Le président français a exprimé son souhait de voir la Chine jouer un « rôle de médiation plus important » dans la guerre de la Russie contre l’Ukraine. « Il y va de l’intérêt de la Chine et de la France, c’est à dire une véritable stabilité », a ajouté M. Macron. Une stabilité chère à Xi Jinping, car c’est une des conditions nécessaires au retour d’une croissance faisant exceptionnellement défaut à la Chine.

Gaëtan Mortier

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