Les ministres de la Défense et des Affaires étrangères de l’UE se sont mis d’accord lundi pour fournir à l’Ukraine deux milliards d’euros de munitions. Cela pose la question des capacités de production tant européennes que françaises.
La guerre en Ukraine consume des dizaines de milliers d’hommes, elle consomme aussi des quantités considérables de munitions. L’artillerie ukrainienne tirerait 5000 à 6000 obus par jour, contre 10.000 à 20.000 pour les Russes, qui sont beaucoup moins précis. Au plus fort des combats, comme ce fut le cas lors de l’été 2022, ces chiffres sont à multiplier par trois ou quatre. En février dernier, le secrétaire général de l’Otan Jens Stoltenberg s’inquiétait du rythme d’utilisation des munitions par les forces ukrainiennes sensiblement supérieur au rythme de production des pays membres. Il rappelait alors ce que beaucoup regrettent depuis longtemps : les dépenses comme les capacités européennes de production en armements et munitions ont été sabrées au cours de plusieurs décennies d’un optimisme coupable. C’est à cette situation que les États européens et l’Union européenne tentent de remédier en urgence.
« On est dans l’urgence »
Afin de pouvoir continuer de soutenir l’Ukraine, les ministres de la Défense et des Affaires étrangères de l’UE ont donc pris une double décision hors du commun : d’une part les États membres se sont engagés à fournir un milliard d’euros de munitions de leurs stocks déjà mis à mal ; d’autre part ils vont passer des commandes communes pour un autre milliard. Sont essentiellement concernés des obus de 155 mm et des missiles pour la défense antiaérienne. Une fois nombre de détails réglés, les premières commandes devraient être effectuées en mai prochain par l’Agence européenne de défense. « On est dans l’urgence, on ne peut pas attendre seulement de nouvelles productions, il faut déstocker et en échange, assurer aux États qu’ils pourront très vite compenser leurs dons », a expliqué Thierry Breton, le Commissaire européen au marché intérieur.
Augmenter les capacités de production
L’augmentation drastique des capacités de production est désormais un objectif de court terme qui fait l’unanimité. L’UE se veut rassurante en comptant sur 15 entreprises situées sur le sol européen capables de produire des munitions de type Otan ou soviétique. La Commission européenne a estimé que la capacité de production pourrait augmenter d’un petit 17% en une année. Il est à craindre que Russes, ou même éventuellement Chinois, soient capables de faire beaucoup mieux pour les obus et les indispensables petits calibres.
Chaque pays européen se trouve face à la nécessité de se remettre à niveau au plus tôt. En France, les premières annonces en 2022 du président Macron sur « l’économie de guerre » tardent encore à être traduites en mesures concrètes et la réalité est encore très loin de ce que signifie vraiment l’expression (lire par exemple Le Monde). Le ministre des Armées Sébastien Lecornu a dévoilé il y a à peine un mois un plan d’accélération de la production de munitions, qui comprend la relocalisation d’activités stratégiques. Dans le même temps, la commission de la défense du Sénat estimait que les industriels « ne bénéficient pas de la visibilité nécessaire pour se préparer à monter en puissance ». L’augmentation de 50 % en 2023 du rythme de production du désormais fameux canon Caesar, pour ensuite doubler en 2024, est en tout cas utile à toute communication. Autre enjeu essentiel : l’approvisionnement en matières premières, à commencer par le titane et les poudres explosives. Relocalisation est désormais un maître-mot.
G.M.
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